De ton fils charmant et clarinettiste
Par : Argali / Le blog de Argali / Romans policiers  / 18 novembre 2020


Policier à la carrière peu exemplaire, Marcel Banville, un célibataire endurci qui ne s’est guère fait d’amis au fil des ans, a repoussé à l’extrême limite le moment de prendre sa retraite tant il appréhende l’ennui qui s’ensuivra. Or, c’est à quelques semaines de la date fatidique qu’il hérite de l’enquête sur les meurtres sordides de prêtres associés à des actes pédophiles, enquête qu’il sait ne pouvoir résoudre avant de remettre son insigne.
C’est donc en toute illégalité que Marcel décide de reprendre son rôle quand, en feuilletant par désœuvrement les albums photos de sa mère – dont le suicide en pleine force de l’âge constitue le douloureux mystère de sa jeunesse –, il réalise que de nombreux religieux gravitaient à cette époque autour de sa mère.

Mon avis :

Loin de l’inspecteur philosophe Pagliaro, auquel nous étions habitués, Marcel Banville est un flic médiocre, peu regardant sur les procédures, ex délinquant et solitaire. Alors que l’heure de la retraite approche, il se voit en charge d’une enquête pour faits de pédophilie et meurtres qui éclabousse le clergé. Il n’aura cependant pas le temps de la résoudre avant son départ. Mais elle continuera à occuper son esprit et le poussera à renouer avec son passé.

J’ai été surprise par le ton et la véhémence de ce polar, loin de ce dont Richard Ste Marie nous avait habitués. Banville éructe plus qu’il ne parle, est cynique, vulgaire dans ses propos et n’a pas la probité de Pagliaro. Je n’ai pas réussi à le trouver sympathique. L’enquête qu’il mène est aussi bien plus sombre et les faits immondes. C’est l’occasion pour lui de régler des comptes avec le milieu clérical. Les personnages de Richard Ste Marie sont plus que crédibles et le récit est rythmé malgré les flashbacks qui hantent l’esprit de Banville entre souvenirs d’enfance et cauchemars.

Comme dans ses romans précédents, Richard Ste Marie fait référence à son passé de musicien, une des nombreuses vies de l’auteur. Il campe aussi l’histoire dans le quartier Limoilou de son enfance à Québec. Sans doute, le sujet est-il aussi en lien avec des faits s’étant déroulé quand il était adolescent même s’il précise que tout n’est que fiction. On sait que le Québec a été profondément marqué par la domination du clergé sur les écoles, l’éducation et la vie quotidienne des familles et que cela a laissé des traces hostiles (jusque dans les jurons typiquement québécois). L’auteur plonge dans ce milieu et ces années-là, pour tisser l’intrigue de son polar. Un pari osé car les blessures sont loin d’être refermées.

J’aime la plume de Richard Ste Marie, ses intrigues à la construction impeccable qui propose toujours des retournements ou des fins inattendus et sa manière de conter si bien des histoires dans l’histoire. Tout sonne juste et ses personnages ont une réelle épaisseur et de plus, il sait se renouveler. Mais le sujet était trop lourd et trop grave pour que ce 7e roman soit parmi mes préférés. J’attends impatiemment de retrouver Francis Pagliaro. Et si ce policier philosophe venait faire un séjour en Europe ?